Fiche technique :
Auteur : Carl Sandburg
Traducteur : Morgane Saysana
Titre : Les émeutes raciales de Chicago, juillet 1919
Editeur : Anamosa éditions
Nombre de pages : 240
Date de parution : Mai 2016
Quatrième de couverture :
Chicago, 27 juillet 1919 : au large d’une plage réservée aux Blancs, un jeune Noir se noie, terrorisé par des adolescents blancs qui lui jettent des pierres. La police refuse d’intervenir, ouvrant la voie à plusieurs jours d’émeutes dans la ville. Bilan : 23 morts parmi les Noirs, 15 parmi les Blancs et des quartiers entiers dévastés. Rapidement, durant ce Red Summer, des dizaines de villes américaines connaissent à leur tour de semblables émeutes raciales. Celles de Chicago, Carl Sandburg, grand journaliste, les saisit sur le vif. Il prend le parti original, non de les décrire, mais de les expliquer. Il montre l’oppression organisée des Noirs, l’immigration imposée, la ségrégation ordinaire, les logements de seconde zone et l’habitude des lynchages.
À l’heure où les émeutes raciales tenaillent toujours les États-Unis, ce petit livre, publié en 1919 et traduit pour la première fois en français, éclaire l’une des périodes les plus troublées de l’Amérique – celle qui, malmenée par la question raciale, accompagne la recrudescence du Ku Klux Klan. Il éclaire aussi une pratique journalistique, celle du reportage, qui ne cède jamais au voyeurisme de la violence.
Avis :
J'ai reçu cet ouvrage dans le cadre de l'opération Masse critique du site Babelio. Un grand merci à eux, ainsi qu'aux éditions Anamosa, pour cette découverte qui a été lue et chroniquée par mon cher et tendre, J., à qui je laisse la place :
Eté 1919, des flambées de violence ensanglantent plusieurs villes des États-Unis : le « Red Summer » (ainsi nommé par James Weldon Johnson), est l'un des moments importants des violences raciales qui jalonnent l’histoire des États-Unis. C’est après les émeutes de Chicago, paroxysme de cet été, que Carl SANDBURG (1878-1967) rédige ce livre non pour décrire les violences et les meurtres mais pour tenter de les expliquer.
Alors que l’œuvre a été publiée en 1919, ce livre est sa première traduction en français (97 ans plus tard…), mais une belle édition pour ma part. Le livre est divisé en 3 grandes parties : une longue préface qui replace le texte de Carl SANDBURG dans son contexte et nous explique son originalité ; le texte lui-même, composé en fait de nombreuses et courtes chroniques ; un dossier documentaire, construit à partir du rapport produit par la Chicago Commission on Race Relations : le dossier énumère les victimes de ses violentes émeutes (ce décompte macabre s’organise dans l’ordre chronologique des victimes dont chacune bénéficie d’une petite fiche avec son nom, sa couleur de peau, la date, l’heure, les causes et les circonstances de sa mort). Au début et à la fin du livre, deux séries de photos illustrent les émeutes puis l’intervention de l’armée.
L’ouvrage de Carl SANDBURG est constitué de différentes chroniques publiées dans le Chicago Daily News. Son style est clair, journalistique. L’auteur dresse un portrait saisissant de la vie difficile des « nègres » ou « personnes de couleur » (comme il était de règle de dire à cette époque et que les éditeurs ont choisi de garder) à Chicago : arrivés massivement dans cette ville du Nord pendant la Première Guerre mondiale, attirés par les emplois et chassés du Sud par la ségrégation et les violences (lynchages), mais qui y trouvent encore de la ségrégation - certes atténuée, mais toujours présente - et des problèmes de logement. Ce qui m’a frappé aussi dans ses chroniques, c'est la place importante qu’occupaient les abattoirs dans la Chicago de la fin des années 1910 : ils sont les principaux pourvoyeurs d’emplois pour les minorités de la ville. Cependant, je dois avouer que je ne connaissais que peu l’histoire de la ville et avais surtout l’image qu’elle eut à partir de cette année-là et la décennie suivante : la Chicago de la Prohibition (1919-1933) et de ses autres formes de violences (les guerres des gangs).
Ce livre au format original (le rabat de la quatrième de couverture se referme sur la tranche du livre pour former un coffret) est un excellent témoignage sur les conditions sociales des Noirs dans la ville de Chicago au sortir de la Première Guerre mondiale, c’est pourquoi je le conseille à tous ceux qui s’intéressent aux Etats-Unis et aux conditions de vie des populations pauvres.